A Wimereux (Pas-de-Calais), des bénévoles ramassent les détritus rejetés par la mer sur 100 mètres de plage, pour mieux les étudier. Leur objectif : recenser les déchets afin d’alimenter une étude et, à terme, trouver des solutions pour limiter la pollution.
Cette plage est prisée des sportifs, des oisifs et des contemplatifs, mais on y trouve aussi de tout, y compris une multitude d’applicateurs de tampons hygiéniques usagés, de mégots, de cartouches d’encre.
« Tout finit toujours dans la mer »
L’engagement de Laurent Colasse remonte à 2007, date de ses premiers ramassages sur les berges de la Seine. Puis, en vacances sur l’île d’Ouessant (Finistère), à l’été 2010, ce chimiste qui vit à Rouen se prend une claque : « J’étais sur la pointe ouest de l’île, dans cet endroit magnifique on ne peut plus sauvage, quand j’ai découvert des granulés de plastique au sol. Les bras m’en sont tombés. Je me suis dit : ‘Non. Pas ici !' »
Depuis, à force de prélèvements effectués sur les bords de la Seine ainsi que sur les côtes de la Manche, il peaufine le portrait-robot de « l’homo-détritus » : il s’agirait d’un pollueur ordinaire, peut-être un peu porté sur la boisson, souffrant de constipation chronique et intraitable sur l’hygiène auriculaire. « On retrouve énormément de bouchons de bouteilles. Par chez moi, on ramasse aussi constamment du Microlax [un laxatif qui s’administre par voix rectale via un petit récipient-flacon en plastique]. C’est la star des médicaments chargés par la Seine, explique-t-il. Le flacon doit avoir un goût particulier parce qu’on le retrouve grignoté, sans doute par des petits animaux. Quant aux cotons-tiges, on en a trouvé entre 2 000 et 2 500 sur 100 mètres en nettoyant les bords de la Seine », continue-t-il en arpentant la digue de Wimereux.
Pour cette journée de nettoyage, triage et recensement de déchets, il a retrouvé à 10 heures des amis de l’association locale Sea-Mer, une dizaine de potes, tous originaire du Nord-Pas-de-Calais. Baskets au pied, sac poubelle à la main, ils sont déjà courbés sur une bande de galets à deux pas du club nautique. La mission : récolter les rebuts, sur 100 mètres uniquement. C’est la règle, conformément au protocole Ospar (en anglais), une initiative européenne de protection de l’Atlantique Nord.
En quelques minutes, bingo : les « classiques » apparaissent, au milieu du verre brisé, des emballages de kebabs, des filets de pêche et des caisses de polystyrène. Cotons-tiges (sans leurs embouts en coton), récipients de Microlax grignotés et bouchons de liège… « . Près de 80% des déchets marins proviennent de la terre ferme.
« C’est essentiel de trier et d’archiver »
« Il m’est arrivé de devoir montrer des trucs à mes parents, comme des emballages ou des marques tellement vieilles que je ne les ai pas connues ! On retrouve des choses qui ont parcouru des milliers de kilomètres aussi, comme hier, un emballage du Canada. » Plus archéologues que nettoyeurs, Jonathan, Laurent et leurs amis cherchent à comprendre d’où viennent ces vestiges pour mieux les combattre. « Je suis originaire d’ici, j’ai fait de la voile très tôt puis je suis entré dans la marine marchande, résume Jonathan, sans préciser à quand remonte son amour pour l’océan.
Sur une bâche, ils ont vidé les neuf sacs de 100 litres remplis de détritus récoltés dans la matinée. Les bouchons d’un côté, les produits d’hygiène ou d’entretien de l’autre, etc. Les emballages alimentaires et les polystyrènes se chiffrent en milliers. Ils les comptent, un par un.
« C’est essentiel de trier et d’archiver ce que l’on retrouve, d’essayer de comprendre », assure Jonathan d’une voix posée.
« Arrêter le déchet à sa source »
Pour les militants de l’association Surfrider Europe, l’interdiction des sacs plastiques à usage unique en France, depuis le 1er janvier 2017, a prouvé qu’il était possible de faire évoluer les mentalités et de contraindre une puissante industrie. « Nettoyer, c’est vrai que ça ne sert qu’à faire parler du problème, à éduquer et à sensibiliser. Le vrai but derrière, c’est d’arrêter le déchet à sa source, confirme Philippe Maison, au téléphone, depuis son bureau de Biarritz. Après les sacs, on va mettre le paquet sur les bouteilles en plastique.
Source : France Tv Info