Trou noir
Dans Trou noir, Edon Descollines s’attaque à ses propres peurs – celles de la violence, de la fin, de la perte et de l’identité – pour en faire le moteur d’une exploration sensible et lucide. Seul en scène, il transforme ses angoisses en matière poétique, invitant le public à plonger dans un univers où l’obscurité n’est plus un ennemi, mais un espace de vérité. Plutôt que de chercher à fuir les ténèbres, l’artiste choisit de les apprivoiser et d’en révéler la beauté cachée.
Le spectacle s’organise en fragments, comme une succession d’instants portés par la mémoire, le corps et la parole. Parfois lecteur, parfois danseur, Descollines enregistre des mots qui s’effacent presque aussitôt, rappelant la menace de l’oubli liée à la maladie d’Alzheimer. Ailleurs, il dessine, improvise des gestes convulsifs, mime un combat invisible. Chaque tableau devient une tentative de retenir ce qui échappe, de maintenir un lien fragile avec soi et le monde.
La scénographie conçue par Amy Keith amplifie cette tension entre le vide et la matière : un trou noir latéral attire et repousse, tandis que des formes suspendues rappellent à la fois l’espace cosmique et la lourdeur du temps.
Artiste associé à la compagnie Joe, Jack et John, Descollines signe une œuvre profondément intime. Sa présence scénique, à la fois vulnérable et puissante, crée une complicité immédiate avec la salle. En acceptant de se confronter à son propre chaos, il fait de la peur un langage, et du noir un lieu de renaissance.